OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 L’État garde dans l’illégalité des millions d’empreintes http://owni.fr/2012/05/17/letat-garde-dans-lillegalite-des-millions-dempreintes/ http://owni.fr/2012/05/17/letat-garde-dans-lillegalite-des-millions-dempreintes/#comments Thu, 17 May 2012 18:33:53 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=110331

Ce mardi 15 mai, à la faveur d’une audience devant le Tribunal de grande instance de Paris, à laquelle nous avons assisté, cinq citoyens ayant porté plainte contre l’État ont contraint le ministère de l’Intérieur à reconnaître qu’il conservait près de 36 millions d’empreintes digitales en toute illégalité et sans se presser pour les détruire. À l’origine de cette procédure : l’administration a refusé de délivrer un passeport à ces personnes au prétexte qu’elles n’avaient donné que deux empreintes sur les huit doigts naguère demandés.

Un arrêt du Conseil d’État du 26 octobre 2011, avait pourtant censuré l’article 5 du décret d’avril 2008 qui permettait la collecte et la conservation de huit empreintes digitales pour toutes les demandes de passeport, alors que deux sont effectivement utilisées sur le document biométrique.

Fichez les tous !

Fichez les tous !

Ce mercredi, dans une relative discrétion, l'Assemblée nationale a adopté un texte permettant de ficher la quasi totalité ...

Prenant acte de ce revers, l’ancien gouvernement Fillon avait publié le 12 avril dernier un décret qui limite à l’empreinte des deux index les renseignements biométriques demandés. Mais, l’administration traine à tirer toutes les conséquences de ces évolutions voulues par le Conseil d’État. Le mois dernier, certaines préfectures, comme celle de la Somme qui l’écrit sur son propre site Internet, demandaient encore la collecte de huit empreintes alors qu’elles seront contraintes de détruire six d’entre elles.

C’est cette situation paradoxale, attentatoire aux principes de collecte et de conservation des données privées de la population française, que les plaignants ont voulu dénoncer lors de cette audience du 15 mai.

Ainsi, dans un courrier datant du 12 janvier 2012, que nous nous sommes procuré, la sous-préfecture de Draguignan refuse de valider la demande de passeport biométrique de l’un des plaignants au motif qu’il n’a laissé les empreintes que de deux doigts. Sans craindre le raisonnement ubuesque, pour se justifier la préfecture donne par écrit son interprétation de l’arrêt du Conseil d’État :

Par conséquent, seule la collecte des huit empreintes et leur conservation dans la base nationale centralisée ont été jugées non conforme au droit. Il est donc possible de [continuer à] collecter huit empreintes mais de ne conserver que les deux qui figurent sur le passeport. Conformément à cette décision, votre demande de passeport est rejetée.

Selon l’avocat, Christophe Lèguevaques, qui porte ce dossier, l’État traîne à se débarrasser de 36 millions d’empreintes illégales qu’il a accumulé entre mai 2008, date de la délivrance des premiers passeports, et avril 2012, voire octobre 2011 lorsque le texte a été censuré par le Conseil d’Etat. Au-delà de la fourniture d’un passeport à ses clients basé sur deux empreintes, il demandait surtout à la justice de constater l’absence de mesures tirant les conséquences de la décision prise en octobre.

Face à l’assignation en justice, la défense, semble-t-il, joue la montre. Le préfet de Paris a adressé un déclinatoire de compétence au procureur de la République du Tribunal de Grande Instance de Paris. Il considère que l’affaire n’est pas de la compétence du TGI et demande à ce qu’elle soit jugé par les tribunaux administratifs. Me Lèguevaques y décèle une tentative d’échapper aux questions de fond que pose l’affaire :

C’est un moyen [pour l’Etat NDLR] d’éviter de statuer sur le fond. S’il [le Président NDLR] se déclare compétent, il doit surseoir à statuer dans l’attention d’une décision du tribunal des conflits. Si le Tribunal des conflits considère que le juge est finalement compétent, alors le juge judiciaire pourra statuer sur le fond de notre affaire… Bref, ils bottent en touche et gagnent de 6 à 18 mois. Si le juge se déclare incompétent, nous irons devant le tribunal administratif et ce sera tout aussi long… Mais si le président se déclare compétent, ce serait la preuve que l’Etat a violé la loi.

Lors de l’audience, devant Jacques Gondran de Robert, Vice-Président du TGI, se tiennent en demi-cercle et en rang serré trois représentants de l’État, le ministère public, un agent judiciaire du trésor et le ministère de l’Intérieur. Une alliance de l’administration qui n’a pas pu éviter que le ministère de l’Intérieur se fasse “remonter les bretelles”, selon la propre expression de sa représentante.

Alors que les empreintes inutiles étaient censées finir à la corbeille illico après le coup de balai du Conseil d’Etat, un grand nombre sont toujours dans le fichier des titres électroniques sécurisés (TES) de l’administration et dans la plus parfaite illégalité. L’État français a encore en sa possession des données biométriques qu’il n’est plus habilité ni à collecter, ni à conserver.

Cela prend un certain retard” reconnaît à la barre la représentante du ministère de l’Intérieur, évoquant “la difficulté de trouver un prestataire” pour répondre à un “marché notifié en mars 2012” date à laquelle l’opération était censée être largement avancée. Mais pas de panique “l’opération est en cours”. Selon le ministère, le dispositif lisait les huit empreintes prélevées pour en conserver seulement deux en fonction de la priorité (l’index est privilégié) mais aussi de la qualité. Dès lors, pas facile de trier ce qui aura disparu d’ici à “septembre 2012” et ce qui devra être gardé. Des explications qui paraissent douteuses pour l’avocat des requérants :

Il n’y a aucune trace de cet appel d’offres [et] l’existence de ce matériel reste à prouver. Depuis octobre 2011 jusqu’au décret d’avril 2012, l’administration est dans l’illégalité de la collecte des empreintes Que deviennent ces informations ? Je ne sais pas.

Les eurodéputés ont la biométrique

Les eurodéputés ont la biométrique

Une dizaine d'eurodéputés demandent à la Commission européenne d'apporter les preuves de l'efficacité des passeports ...


Les appareils qui sélectionnent les empreintes permettraient encore d’en photographier quatre sans pour autant qu’il soit possible de déterminer combien sont conservées. C’est “toute l’ambiguïté” du problème selon l’avocat : “Depuis octobre 2011, ça m’étonnerait qu’ils aient changé tous les équipements.”

Le Tribunal se prononcera sur sa compétence le 5 juin prochain. En attendant, les plaignants ont déposé un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), pour faire date. Le Royaume-Uni avait déjà été condamné en décembre 2008 par l’instance européenne pour “atteinte au droit au respect de la vie privée“, argument également utilisé dans l’assignation avec “la liberté d’aller et venir“, dans une autre affaire impliquant à la fois les empreintes digitales et les données génétiques.

Ces derniers mois, une dizaine d’eurodéputés ont demandé à la Commission européenne d’estimer les coûts de ces nouveaux passeports biométriques dont ils pensent que l’efficacité réelle n’est pas démontrée.


Illustration par John-Morgan (CC-by)

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Anonymous promet une Révolution 404 http://owni.fr/2012/04/25/anonymous-promet-la-revolution-404/ http://owni.fr/2012/04/25/anonymous-promet-la-revolution-404/#comments Wed, 25 Apr 2012 16:33:12 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=107924

Après la publication sur le web de 3 500 courriels provenant des boîtes mails de membres du Gouvernement transitoire tunisien, des Anonymous lance un ultimatum au pouvoir en place.
Le collectif de hackers appelle la population à manifester le 1er mai, avenue Habib-Bourguiba à Tunis. Des Anonymous déclarent une “guerre ouverte” aux salafistes tunisiens qu’ils accusent de s’être fournis en armes via la Libye fin 2011. La manifestation devrait remonter l’avenue jusque devant le ministère de l’Intérieur.

L’objectif annoncé est de convaincre le Gouvernement transitoire de faire marche arrière sur le projet de lutte contre la cybercriminalité qui prévoit un contrôle accru d’Internet. Le projet est en marche. Le Gouvernement souhaite maintenir et réformer l’Agence tunisienne d’Internet, déjà en fonction sous Ben Ali et annonce la création de commissions chargées d’assurer la sécurité “des tunisiens sur l’Internet“. Ces dernières, qui accueilleront des spécialistes des télécoms formés au ministère de l’Intérieur, sont perçues comme un retour à l’ère de la censure. Des Anonymous ont indiqué à OWNI posséder des preuves accréditant une telle hypothèse :

Nos investigations ont confirmé qu’il s’agit d’un stratagème mis en place par le ministère de l’Intérieur en date du 29 Mars 2012 afin de contrer toute opposition au parti Ennahda. Ce plan n’a pour but que de reprendre la main sur internet, puis [sur] les médias, [et] donc contrôler à nouveau ,comme à l’ère de Ben Ali, les libertés d’expression.

Le terme de cybercriminalité, à l’image du terrorisme, reste toujours flou. Il peut signifier une amélioration de la sécurité des sites Internet publics pour limiter les attaques informatiques et le pillage d’informations sensibles comme il peut, a contrario, concerner les échanges d’informations sur la toile (activités sur les réseaux sociaux, emails, sites visités etc…).

Avant Révolution de Jasmin, la censure de l’Internet tunisien était répandue et exercée par Ammar 404. Un mystérieux flic du web souvent associé à l’Agence tunisienne d’Internet sans laquelle il n’aurait pu agir sur les sites portants “atteintes aux bonnes moeurs”. Le dispositif de cyber-répression pouvait consister à intercepter des emails de citoyens tunisiens et disposait de moyens techniques suffisants pour filtrer la quasi-totalité de l’Internet du pays, l’un des plus actifs d’Afrique du Nord.

Au cours des années Ben Ali, des centaines de blogs et de pages web ont ainsi été fermés parce qu’ils défiaient le régime et ses dirigeants. C’est en référence à Ammar 404 que les Anonymous ont intitulé leur opération la “Révolution 404″

La mobilisation du peuple tunisien voulue par des Anonymous intervient dans un contexte houleux. Malgré la décision, début avril, par le ministère de l’Intérieur, d’autoriser à nouveau les manifestations sur l’axe principal de la capitale, Human Rights Watch considère l’acte encore “insuffisant pour protéger le droit de rassemblement et de réunion” et pointe du doigt “l’usage excessif de la force contre les manifestants“.

D’autant que plusieurs affaires judiciaires sur fond de religion sont en cours dans le pays. Le procès de Nabil Karoui, directeur de la chaîne Nessma TV, pour “atteintes aux valeurs du sacré” qui avait repris depuis le 19 avril, vient d’être reporté au 3 mai prochain.

Il est accusé d’avoir autorisé, en octobre 2011, la diffusion du film d’animation “Persepolis”, primé à Cannes en 2007, où dieu est représenté sous les traits d’un vieil homme à la barbe blanche. Le film avait suscité de vives réactions au sein de la population donnant lieu à des émeutes puis à un sit-in depuis le 2 mars dernier qui s’est achevé récemment.

Fin mars déjà, des peines de sept ans d’emprisonnement avaient été prononcées à l’encontre de deux Tunisiens pour publication de documents “de nature à nuire à l’ordre public ou aux bonnes moeurs“. Lesquels caricaturaient la biographie et l’image du prophète Mahomet.

Le statut des médias nationaux fait également débat dans le pays. Dans un communiqué, l’Instance nationale pour la réforme de l’information et de la communication (Inric) a indiqué son désaccord quant à la “privatisation des médias publics”.

Cette réaction intervient quelque jours seulement après des déclarations à la presse de dirigeants du parti islamiste Ennahda, première force politique du pays, exprimant l’intention de “prendre des mesures radicales dans le domaine de l’information”. Rached Ghannouchi, président d’Ennahda, majoritaire à l’Assemblée constituante, s’est interrogé dans une récente interview “pourquoi les régimes démocratiques maintiendraient-ils des médias officiels ?” avant d’accuser ces mêmes médias de “comploter contre la volonté du peuple“.

L’Inric rappelle que les médias de service public participent “grâce à leur indépendance et à leur neutralité à l’égard de tous les centres de pouvoir” au jeu démocratique consistant “à développer la conscience du citoyen”.

De son côté, Anonymous n’a pas l’intention de faire marche arrière sur la question du contrôle du web par le Gouvernement :

Ce peuple qui a dit non a Ben Ali , ce peuple qui a créé le Printemps Arabe, ce peuple qui a pleuré le jour où l’on a touché à son drapeau, n’acceptera plus jamais la soumission.

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Les barbouzes de l’e-réputation http://owni.fr/2012/04/24/une-cyberguerre-contre-usa-today/ http://owni.fr/2012/04/24/une-cyberguerre-contre-usa-today/#comments Tue, 24 Apr 2012 16:35:18 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=107570 USA Today ont été victimes d'une violente campagne de dénigrement sur Internet, afin de les décrédibiliser, avant publication de leur article.]]>

Aux États-unis, deux journalistes du quotidien USA Today ont lancé un pavé dans la mare. Ils affirment avoir été la cible d’une campagne de dénigrement visant à détruire leurs réputations professionnelles sur la toile. Leur tort, avoir enquêté sur des sociétés privées, suspectées d’être employées par le département américain de la défense pour mener une guerre de propagande.

Début 2012, Tom Vanden Brook et Ray Locker s’engagent sur un terrain miné : les campagnes de propagande menées en Afghanistan ou en Irak par des cabinets de communication spécialisés travaillant pour le Pentagone.

Ces “psyops” sont comparables à des opérations d’influence, voire de manipulation, réalisées auprès des populations des pays dans lesquels est déployée l’armée américaine afin d’influencer la population par le biais de messages de propagande voire de manipuler l’opinion public pour faciliter les opérations militaires. Les deux journalistes supposent que la facture de cette guerre de propagande pourrait être salée pour le contribuable.

Compte-tenu du secteur au sein duquel leur enquête évolue, les deux journalistes sont repérés dès les premières prises de contact avec les sociétés engagées dans le programme du Pentagone, comme Leonie Industries qui a passé de juteux contrats avec l’US Army. Le sujet est suffisamment sensible pour que soit décidé de calmer ces deux journalistes un peu trop fouineurs.

Ainsi, le 7 janvier dernier, seulement deux semaines après les premiers coups de fils, les sites TomVandenBrook.com puis RayLocker.com sont créés. Rapidement, des comptes Facebook et Twitter eux aussi faux, viennent compléter le dispositif de propagande.

Ceux qui s’en prennent aux deux journalistes possèdent suffisamment de compétences en informatique pour masquer leurs identités à grands coups de serveur proxy et utilisent des adresses fictives localisées dans le Colorado. Les deux faux-sites s’emploient à altérer les réputations des vrais Tom Vanden Brook et Ray Locker en les accusants de travailler pour le compte des talibans. Cette première “e-agression” confirme au tandem qu’il se trouve sur une piste certes sinueuse mais néanmoins prometteuse. Ils décident de poursuivre.

Devant la témérité des gêneurs, une deuxième salve est tirée sur Vanden Brook, le 8 février 2012. Une page Wikipédia portant le nom du journaliste est créée et relaye de fausses informations sur son passé professionnel en lui attribuant, à tort, “une notoriété mondiale” pour “sa désinformation” dans la catastrophe de la mine de Sago.

Six années auparavant, en janvier 2006, une explosion a lieu dans une mine de charbon à Sago en Virginie-Occidentale piégeant treize mineurs sous terre. Un rapport contenant des informations erronées est remis au responsable de la mine puis transmis au USA Today ainsi qu’au New York Times. Pris dans la confusion,Vanden Brook annonce que douze mineurs sont sauvés. En réalité, seul un mineur en ressortira vivant.

Pour parfaire la manoeuvre, les auteurs du stratagème utilisent le faux compte Twitter de Vanden Brook (@TomVandenBrook) pour simuler la réaction et la défense du journaliste au sujet de l’accusation en s’arrangeant pour l’enfoncer encore un peu plus. Contacté par OWNI, Ray Locker, nous a expliqué que sa hiérarchie lui avait demandé de ne plus s’exprimer sur cette affaire. Dans une récente interview, il déplorait la manière dont l’histoire a été utilisée pour nuire à Vanden Brook :

Ils se sont servis de cette affaire pour tenter d’ébranler sa crédibilité. En 30 ans, je n’ai jamais vu cela.

Les comptes Twitter, Facebook ainsi que tous les sites internet usurpant les identités des deux journalistes ont été fermés depuis. L’affaire pourrait remonter jusque dans les plus hautes sphères de l’Etat. USA Today n’exclue pas que les sites internet en question aient été lancés avec le soutien financier de fonds fédéraux. Un tel financement, en plus de poser la question des atteintes à la liberté de la presse aux États-Unis, violerait la loi fédérale américaine prohibant “la propagande à des fins domestiques”.

L’enquête des deux journalistes a été publiée le 29 février. Elle a révélé que le Pentagone avait versé des centaines de millions de dollars à ces entreprises privées pour qu’elles diligentent des opérations de “guerre psychologique“. Le Pentagone a assuré à l’AFP ne “pas être au courant” de telles activités de la part des contractuels qu’il emploit.

De son côté, Ray Locker préfère regarder cette affaire avec philosophie :

Je pense que c’est bien que nous ayons porté l’attention sur elle [la propagande NDLR]. Je suis content que les gens qui travaillent avec moi me soutiennent.


Illustration par PropagandaTimes (cc)

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Les Anonymous dévoilent Ennahdha http://owni.fr/2012/04/17/les-anonymous-devoilent-ennahda/ http://owni.fr/2012/04/17/les-anonymous-devoilent-ennahda/#comments Tue, 17 Apr 2012 10:53:05 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=106286 OWNI s'est entretenu, ont installé sur des serveurs plus de 3 000 mails de dirigeants du parti islamiste tunisien Ennahda, actuellement au pouvoir. Dont certains se révèlent embarrassants pour le gouvernement. Un email dévoilé hier envisageait des manoeuvres en vue d'intégrer la charia au droit tunisien, en dépit des déclarations officielles. D'autres évoquent des opérations financières douteuses.]]>

Depuis le début du mois d’avril, des milliers d’emails de dirigeants du parti Ennahdha, au pouvoir en Tunisie, sont piratés et diffusés par les Anonymous. Hier, une nouvelle vague de fuites contenait des documents potentiellement embarrassants pour les dirigeants d’Ennahdha. Ces courriels proviennent du ministre de la l’Agriculture, Mohamed ben Salem.

On peut y lire en particulier un procès-verbal du bureau exécutif d’Ennahdha daté du 19 mars dernier (en arabe). Le document indique que les membres du bureau ont évoqué l’idée d’une opération de déstabilisation contre les institutions internationales qui participent au soutien financier de la Tunisie – soit le FMI, l’Union européenne et la BCE – avant de se rétracter.

Lors de cette même réunion, il a également été question de trouver des solutions pour intégrer des éléments de charia dans le droit tunisien. Même si publiquement le parti Ennahdha revendique la culture musulmane mais se défend de vouloir faire appliquer la charia.

Cette découverte en accompagne des dizaines d’autres. Jusqu’ici, 3 500 documents appartenant notamment au Premier ministre Hamadi Jebali ont été mis en ligne sur des serveurs des Anonymous. Dans ces listes de courriels, il est aussi question de fraudes électorales, de censure ou d’opérations financières.

Ennahdha, majoritaire à l’assemblée constituante, et le gouvernement démentent mordicus la véracité d’une partie des documents. De son coté Anonymous, assure de leur authenticité et promet de nouvelles révélations sur les coulisses du pouvoir de ces deux dernières années.

En octobre 2011, neuf mois après le départ de Ben Ali, qui profite désormais de sa retraite de dictateur dans une salle de sport en Arabie Saoudite, les premières élections libres ont eu lieu en Tunisie. Celles-ci ont pour but la création d’une Assemblée constituante qui devra rédiger la prochaine loi fondamentale du pays. Après décompte, les membres du parti islamiste Ennahdha  sortent très largement vainqueurs du scrutin et raflent 89 sièges sur les 217 que compte la nouvelle Assemblée.

Cependant, un courriel provenant de la boîte mail du Premier ministre, Hamadi Jebali, évoque l’existence de possibles fraudes électorales. Selon le document, les Tunisiens de l’étranger auraient pu voter deux fois. Une première fois dans leur pays de résidence et une seconde fois en Tunisie.

Un rapport de l’organisme supervisant l’élection aurait même été déposé pour annuler les votes du bureau de Bruxelles Nord pour cause d’irrégularités.

Un second document interpelle également sur les règles du scrutin. Selon ce tableau statistique, le nombre de sièges attribués par région ne serait pas conditionné au nombre d’habitants y résidant mais à sa superficie totale.

La légitimité de la première force politique du pays est, potentiellement, sujette à caution si les documents s’avéraient authentiques. D’autant que le nouveau gouvernement ne semble pas avoir souhaité partager le pouvoir. C’est tout du moins ce qu’explique un des membres d’Anonymous Tunisia avec lequel OWNI s’est entretenu :

Nous avons attaqué Hamadi Jebali parce qu’il est le symbole d’un gouvernement qui fait marche arrière sur les libertés, pas parce qu’il fait parti d’Ennahdha. Le gouvernement est responsable d’actes d’agressions commis contre des manifestants chômeurs et du lancement d’une cellule de sécurité pour censurer et contrôler Internet. Le fait d’être élu par le peuple n’est pas une raison pour s’en prendre à nos libertés.

D’ailleurs, dans les mails publiés, un document atteste de l’exclusivité du pouvoir voulue par des responsables du parti islamiste. Celui-ci évoquait la possible suppression par la télévision nationale du terme “transitoire” pour qualifier le gouvernement en place.

Majoritaire à l’Assemblée constituante, Ennahdha a officiellement envisagé jusqu’à la fin mars, d’intégrer la loi islamique dans la nouvelle constitution du pays.  Ennahdha, encore, discutait en interne de la nécessité de garantir la non-indépendance de la Banque centrale tunisienne et déplorait dans un autre documentla pression européenne et française pour accélérer le processus démocratique”.

Mais la ligne politique adoptée par le gouvernement transitoire n’est pas l’unique élément abordé dans ces courriels. Des affaires financières, plus troubles, semblent y apparaître. Comme ce courrier envoyé sur la boîte mail du parti Ennahdha et contenant les coordonnées bancaires de Kamal Ben Amara, un élu Ennahdha à l’Assemblée constituante, titulaire d’un compte à la Qatar international islamic bank. Avant de s’engager en politique il aurait travaillé chez Qatar Petroleum, la compagnie pétrolières nationale du riche État du Qatar, comme le montre un ancien répertoire du groupe. Et dans l’actuel gouvernement ben Amara a été nommé vice-président à la Commission de l’énergie.

À ce titre, il fait partie des membres du gouvernement habilités à négocier, entre autres, les investissements dans la raffinerie de Skhira, la plus grande de Tunisie, avec une production estimée à 120 000 barils par jour.  Coût de construction : 1,4 milliard d’euros. Un appel d’offres remporté par Qatar Petroleum qui pourra l’exploiter en partie pour les deux décennies à venir.

En outre, dans les coordonnées bancaires envoyées par mail à Ennahdha, figure un “Swift Code” utilisé pour les virements internationaux. Le problème étant de savoir dans quel sens les virements bancaires ont été effectués. De Kamal Ben Amara vers Ennahda ou du parti vers Ben Amara, pour les besoins de sa campagne électorale par exemple.

Devant les nombreuses interrogations que posent ces documents, aussi bien dans leurs contenus que sur leur authenticité, Anonymous invite les internautes qui le peuvent à vérifier sans tarder:

Les emails comme les SMS et les moyens de communication électroniques sont devenus des pièces justificatives devant les tribunaux. Les en-têtes des emails confirment les sources et les trajets des courriels via leur identifiant unique. S’ils étaient falsifiés, tout le monde le remarquerait et surtout les spécialistes en informatique. J’invite tous ceux qui doutent à vérifier.

Début avril, le gouvernement tunisien a annoncé qu’il maintenait en activité l’Agence tunisienne d’Internet pour lutter contre la cybercriminalité. Sous la dictature, l’agence gérait la censure sur Internet pour le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), l’ancien parti de Ben Ali. Dans le principe de “sécurisation du web”, Anonymous voit un retour masqué de la censure. Incompatible, selon le collectif, avec la garantie des libertés individuelles :

Ceux qui gèrent le pays sont ceux qui doivent assumer. Mais si le Gouvernement change de ligne de conduite, surtout concernant la censure du net, Anonymous fera un pas en arrière.
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Parlement en open source http://owni.fr/2012/04/11/le-parlement-de-lopen-source/ http://owni.fr/2012/04/11/le-parlement-de-lopen-source/#comments Wed, 11 Apr 2012 15:58:23 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=105384 OWNI, la culture de l'open source est entrée au Parlement. À l'Assemblée nationale se déroulait en France le premier GouvCamp. Un projet citoyen qui vise à fabriquer le droit en mutualisant toutes les compétences de la société civile.]]>

De la salle Lamartine de l’Assemblée Nationale, s’échappe un parfum de démocratie directe. Ce mardi 10 avril, les sièges disposés en cercles concentriques n’accueillent pas les parlementaires, qui occupent habituellement la salle de débat, mais des citoyens. Français, belges, suisses, tunisiens, syriens et même une délégation québécoise ont répondu présent pour ce GouvCamp à la française. Grande manifestation citoyenne – et francophone- le GouvCamp avait pour but de définir et d’améliorer le projet Parlement et Citoyens qui souhaite associer de façon directe le peuple à l’élaboration de la loi.

Dans ce but, une plateforme web open source a été élaborée. Elle permet «aux élus de collaborer avec les parties prenantes». L’objectif est de donner «de la visibilité aux propositions de lois déposées devant le parlement tout en leur assurant le soutien de la société civile».

Si l’initiative reste encore à un stade embryonnaire en Europe, dans l’hexagone le projet avance à grand pas. En quelques mois seulement, l’équipe de Démocratie Ouverte, qui porte le projet francophone, a réussi à sensibiliser les élus du Parlement au concept de “Gouvernement Ouvert” et organisé un barcamp avec  une centaine de participants politiques, citoyens, développeurs, chercheurs…

Un pari ambitieux pour ces citoyens, jeunes pour la plupart et possédant une culture et des pratiques numériques avancées qui espèrent obtenir le même résultat que nos voisins d’outre-Atlantique. Le concept d’OpenGov est déjà sur les rails au Canada mais également aux Etats-Unis sous l’impulsion de l’administration Obama, pionnière en la matière.

La France, elle, fait figure de retardataire dans ce domaine. Le processus législatif y est parfois long et la mise en place d’un tel système suppose un bouleversement du paysage politique français ainsi qu’une refonte des pratiques parlementaires.

C’est pour répondre à ces problématiques méthodologiques mais également logistiques qu’acteurs et curieux se sont rassemblés hier. Au programme, débats et coups de projecteur sur les projet amis comme PropX, MeetingVoxe ou Voxe.org dont nous vous parlions il y a quelques semaines.

Débattues en ateliers avant d’être partagées, les propositions de définition, de financement et de choix techniques ont fait l’objet d’une notation par l’ensemble des participants à l’aide d’un système de cartons de couleur. Tous se sont accordés pour approuver Cyrille Béraud, Président de la Fédération québécoise des communautés et industries du libre, lorsqu’il déclarait :

Il ne peut y avoir de gouvernement ouvert sans une appropriation collective des logiciels libres.

En revanche, la question de l’attraction des citoyens vers la plateforme puis de les “fidéliser” a soulevé plusieurs réactions chez les participants dont beaucoup ont estimé qu’il ne s’agissait pas “de considérer le citoyen comme un client” et de réduire le projet à un objet marketing.

De la même manière, la réflexion sur le financement divise les participants. Si certains défendent le devoir pour les pouvoirs publics de mettre la main au portefeuille, d’autres ont fait valoir la nécessité d’indépendance qui devait entourer, de manière permanente, le processus vers un gouvernement ouvert.

À l’heure actuelle, le chiffrage du projet est difficile car les sources de financement n’ont pas encore été clairement définies. Cependant, à titre d’exemple, un membre de la délégation québécoise faisait remarquer que son pays s’était doté du matériel informatique approprié en reprenant les bases posées par les Américains pour un coût total de 75 000 dollars. Une contrainte budgétaire qui n’en est pas une quand on sait qu’un candidat à l’élection présidentielle française peut dépenser avant le premier tour jusqu’à 16,8 millions d’euros…

La suite du GouvCamp, devrait avoir lieu le 16 mai prochain et sera diffusée en streaming ou ” web-diffusion en direct” comme le disent nos cousins québécois. D’ici là, les militants citoyens de l’OpenGov espèrent une convergence avec la Francophonie au moment du sommet de Kinshasa en octobre, et l’arrivée de bras supplémentaires comme nous le confiait Cyril Lage, l’un des organisateurs :

Le projet est debout depuis seulement quelques mois. Tout est à construire [mais] venez, il y a du boulot pour tout le monde.


Illustration par armel.lecoz (cc) et – avec autorisation  -  emergent007 (@Emergent007)

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Tweet saoudien de lèse-majesté http://owni.fr/2012/04/02/tweet-de-lese-majeste/ http://owni.fr/2012/04/02/tweet-de-lese-majeste/#comments Mon, 02 Apr 2012 21:00:31 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=104440

Avec plus de 200.000 abonnés, un grand nombre de Saoudiens ont déjà entendu parler de @Mujtahidd. Depuis plus de trois mois, ce twittos saoudien dénonce le train de vie du pouvoir en place, les trafics et les collusions diverses de la famille régnante des Al Saud, et leurs combines avec les grandes capitales occidentales. Lesquelles en contre-partie se montrent très arrangeantes avec son fondamentalisme religieux à visée internationale. Traqué sur la toile par le régime, @Mujtahidd multiplie les révélations avec une démarche influencée par la culture Wikileaks. Entretien.

Comment vous présenteriez-vous ? Qu’est-ce que @Mujtahidd ?

Mujtahidd est un symbole dans une lutte soutenue contre la corruption sale. Un combat qui commence avec la dénonciation de ceux qui sont corrompus et s’achève avec leur suppression. Mujtahidd n’a pas besoin de réveler son identité dans le but d’atteindre cet objectif. En effet, pour de mutliples raisons, rester anonyme peut constituer un avantage.

Votre pseudonyme sur Twitter, @Mujtahidd renvoie-t-il  à Mujtahid, celui qui prononce une interprétation personnelle sur un point de droit dans l’islam ?

Oui et non. Oui, l’orthographe est la même et non car il y a une signification générale. Mujtahid, en général, c’est quelqu’un d’engagé qui fait de son mieux avec responsabilité et sincérité. Premièrement, je fais de mon mieux pour vérifier l’exactitude des informations. Deuxièmement, je décide si cela peut être publié. Troisièmement, je décide comment le publier.

Quel est votre point de vue sur les dirigeants de l’Arabie Saoudite, et la manière dont ils gouvernent ?

Les dirigeants du pays ne s’intéressent pas à son bien-être. Ils sont intéressés par leur propre autorité et leurs privilèges. C’est pourquoi toutes les ressources du pays sont à leurs services. C’est aussi pourquoi le pays souffre de la pauvreté, du chômage, de la criminalité et d’une fracture sociale  en dépit de ses énormes ressources.

Avez-vous des exemples précis pour illustrer cette description ? Quels privilèges dénoncez-vous ?

J’ai écrit des milliers de tweets à ce sujet. En les lisant, vous verrez les rois européens à l’époque du Moyen Âge. Les Al-Saoud traitent le pays comme leur propriété. Le pays, ses ressources, son identité, sa culture, son histoire, tout leur appartient.

La presse saoudienne fait-elle son travail ? Ou sont-ils aussi touchés par la corruption ?

Ils sont controlés par le régime. Toute la presse saoudienne attaque Mujtahid. Le régime a décidé d’élargir l’espace de liberté dans le but de diminuer le role d’Internet et de la télévision par satellite.

Sur Twitter, vous avez plus de 280.000 followers. De quelle façon Twitter constitue-t-il une plate-forme pour dénoncer la corruption et le mode de vie des dirigeants saoudiens ?

Twitter est un moyen beaucoup plus facile et plus rapide pour diffuser un message que les autres réseaux sociaux. C’est plus simple pour vos followers de prendre conscience de votre message et c’est également plus facile d’y interagir. Peut-être que ces caractéristiques font de Twitter un outil efficace pour permettre à une personne sans ressources de réaliser ce que l’on ne pourrait pas faire sans avoir un système de propagande.

Vous êtes souvent comparé à un Wikileaks version saoudienne. Pourquoi faire ces révélations ? Pourquoi prendre ces risques ? Pourquoi vous ?

Parce que je dispose des informations nécessaires et je suis capable de les utiliser de manière efficace pour obtenir le résultat que j’ai mentionné précédemment.

Vous vous en prenez régulièrement au Prince Abdel-Aziz Ben Fahd, pourquoi ?

J’ai commencé avec lui. En matière de corruption financière, il est définitivement le pire. Il a grandi quand son père jouissait d’une autorité absolue avant les premières oppositions relayées par l’Internet et la télévision par satellite. Il avait carte blanche pour faire tout ce qu’il voulait sans la moindre surveillance.

Le connaissez-vous personnellement pour en savoir autant sur lui ?

Je sais tout ce que je publie sur lui.

Souhaitez-vous que l’Arabie Saoudite s’engage sur un chemin démocratique comme l’ont fait la Tunisie puis l’Égypte ?

Cette décision revient au peuple. C’est lui qui décide. Mais si le régime se plie aux demandes de réformes, c’est le meilleur scénario.

Pensez-vous que le régime actuel puisse l’accepter ?

Le régime actuel est à l’abri des réformes. C’est irréformable. Je connais très bien la structure de la famille royale. Les membres les plus importants ne veulent pas de réforme et les membres potentiellement bons n’ont aucune autorité.

Comment pensez-vous être perçu par les saoudiens ?

L’un de mes fans a mené une enquête. La grande majorité croit ce que je dis et pense que j’agis pour de bonnes raisons. La majorité pense également que Mujtahid est une équipe emmenée par une personne très instruite. 12% des 10 000 personnes qui ont répondu à l’enquête ne croit pas que ce que je dis est vrai.

Le pouvoir saoudien cherche-t-il a vous faire taire ?

On m’a proposé des pots-de-vin pour que j’arrête. S’ils pouvaient me localiser physiquement, ils m’arrêteraient. Mon compte Twitter et mon email font constamment l’objet de tentatives de hacking. Mais ce qu’ils font tout le temps, c’est d’utiliser leurs agents pour me mentionner de façon négative sur Twitter. Cela ne fonctionne pas bien et l’enquête en est la preuve.

Est-ce que des saoudiens vous contactent sur Twitter pour vous poser des questions sur le train de vie des dirigeants ou vous fournir des informations ?

Je reçois des mails en tout genre : Informations, commentaires, questions et insultes.

En 2011, le Prince Al-Walid Ben Talal a investi 300 millions de dollars dans Twitter. Demain, s’ils vous empêchent de twetter, que ferez-vous ?

Non. Pour ce que j’en sais, cet investissement ne changera rien à la politique de Twitter. Si cela change, un autre réseau le remplacera.


Illustration par Surian Ssoosay (cc)

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http://owni.fr/2012/04/02/tweet-de-lese-majeste/feed/ 17
Twitter change le marketing politique http://owni.fr/2012/03/29/twitter-change-le-marketing-politique/ http://owni.fr/2012/03/29/twitter-change-le-marketing-politique/#comments Thu, 29 Mar 2012 09:10:47 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=103740

Avec la Twittosphère, le cycle classique de l’information est rompu. C’est l’un des enseignements de cette campagne, pour les communicants au services des partis politiques. Des discussions privées se déroulent au sein desquelles citoyens, journalistes et élus sont sur le même plan, mais surtout sans que l’on distingue toujours le responsable politique dans sa vie publique ou dans sa vie privée.

Pour Olivier Le Deuff (@neuromancien), maître de conférences en Sciences de l’information et de la communication à Bordeaux 3, et twittos de la première heure, la distinction doit se faire naturellement sans altérer la réciprocité de l’échange :

Twitter implique une projection totale de l’utilisateur et non pas partielle. Notre identité personnelle et professionnelle y sont mixées. C’est cet élément qui crée le lien social et politique. De la sympathie qui en découle naît le sentiment de proximité. Le mauvais exemple, c’est Nadine Morano qui ne fait aucune distinction entre sa propre personne et sa projection institutionnelle. Il en résulte une incapacité a communiquer. Du coup, elle est dans l’erreur et ne devrait pas aller sur Twitter.

Le lien qui relie la personnalité politique à ses followers (ses abonnés) suppose la gestion du compte par la personnalité politique elle-même. Une réalité d’utilisation qui n’est pas une évidence pour tout le monde. Les deux principaux candidats en lice pour l’Elysée ne respectent d’ailleurs pas la règle en faisant administrer leurs comptes par leurs équipes de campagne. Sans doute, les enjeux sont-ils trop importants pour risquer la moindre gaffe par manque de maîtrise ou de pratique. Mais, une fois l’élection passée, le nouveau chef de l’Etat pourrait-il se permettre de tweeter ? Sur ce point, Olivier Le Deuff, émet des réserves :

L’image de l’institution présidentielle bloque. En France, avec une autorité présidentielle quasi monarchique, il n’y a pas de réciprocité mais une suprématie. On peut écouter ses déclarations mais pas discuter avec elle d’égal à égal.

Pour l’heure, en campagne électorale, cette twittosphère semble se développer comme un complément aux autres vecteurs de communication. La blogosphère politique n’est pas moins forte depuis le succès de Twitter, au contraire. C’est le constat de Louis-Serge Real Del Sarte (@LouisSerge), auteur du livre «Les réseaux sociaux sur Internet» et fondateur de l’agence de conseil en e-réputation ReaClic :

La politique, c’est de l’information, qu’elle soit de l’intox ou de la désintox, cela reste de l’information et elle n’a pas tué le blog. Il ne mourra jamais pour une évidence, le blog reste un endroit où l’on a ses propres règles contrairement aux réseaux sociaux où l’utilisateur est soumis à des règlementations communes. Twitter permet de faire voyager l’information alors que le blog est un espace numérique en ligne destiné à quelqu’un qui va vouloir séduire. Twitter est un outil précieux qui génère du buzz et de la viralité.

Twitter ne peut donc pas être l’unique vecteur de l’information puisqu’il suppose la présence d’autres appareils de communication pour le compléter. Une conception du réseau social qui nécessite une certaine pratique numérique de la part des utilisateurs. D’ailleurs, la «communauté des twittos» est plutôt jeune rapporte Louis-Serge Real Del Sarte :

Twitter rassemble 70% d’utilisateurs âgés de moins de 45 ans et touche une majorité élective plutôt masculine ainsi qu’une population plus urbaine puisque 30% sont localisés en Île-de-France. Le problème qui se pose alors c’est qu’avec Twitter, vous ne touchez pas le reste de la population.

Une suractivité des spécimens parisiens de la “génération Y” sur le réseau social ne constitue pas une faiblesse mais une opportunité électorale supplémentaire pour Olivier Le Deuff :

Le public est différent sur Twitter. On y trouve surtout des journalistes et des universitaires. C’est important pour un homme politique d’y aller car c’est un moyen de convaincre des gens qui savent s’exprimer et qui peuvent, à un moment donné, traduire une pensée plus large.

Tempête dans un verre d’eau diront les détracteurs de Twitter. Pourtant, la communauté des “Twittos” n’a fait que s’agrandir ces derniers mois (1 million de français inscrits sur Twitter au quatrième trimestre 2011 pour 5,2 millions de profils ). Conséquence de l’effet de mode ou envie d’accéder à une nouvelle manière d’interagir avec ceux qui nous représentent. Et Louis-Serge Real Del Sarte d’assurer que la tendance ne peut que se confirmer :

La France vit une révolution culturelle. Le taux d’équipement de la population est important puisqu’il y a 18 millions de «mobinautes» Android et iPhone. On compte déjà plusieurs millions de comptes en France alors Twitter ne peut que se développer. Quand il arrivera à maturité, 100% des personnes l’utiliseront.

Mimétisme

Malgré l’attractivité qu’il dégage de part sa visibilité sur la toile, Twitter reste un outil en voie de généralisation qui constitue l’exception plutôt que la règle. Arnaud Mercier (@ArnauddMercier), professeur en science de l’information et de la communication à l’Université Paul Verlaine de Metz, et auteur de “Médias et Opinions Publique” reste sceptique. Pour lui, Twitter est loin d’être indispensable :

Une partie des politiques inscrits sur Twitter le sont par mimétisme. Il faut en être parce que ça fait moderne mais certains ne savent pas eux-même pourquoi ils y vont. Je ne crois pas que cela soit devenu essentiel d’être sur Twitter. C’est une caisse de résonance supplémentaire.

Un avis partagé par Edouard Gassin, directeur de l’agence de communication politique Mille Watts fondée en octobre 2006 :

Est-ce qu’il faut vraiment être sur Twitter quand on est un homme politique ? Nous, la réflexion que l’on a, c’est de savoir si c’est pertinent de déployer [le politique NDLR] sur Twitter. C’est un outil très chronophage qui nécessite un investissement important. Si l’on parle des campagnes présidentielles de Hollande et Sarkozy, des dizaines de personnes travaillent dessus. Mais c’est une évidence, les résultats sont bien meilleurs en terme d’audience quand ce sont les vrais élus qui s’investissent personnellement.

Pour, arriver à générer ce fameux lien de proximité avec ses followers, les politiques sont amenés à conjuguer leur rôle d’élu avec celui de n’importe quel utilisateur de Twitter. Cela suppose d’autres tweets que ceux ayant tendance à cantonner le propriétaire du compte dans une forme de communication unidirectionnelle. Pour Edouard Gassin, il s’agit d’éviter la banalisation de l’élu dans son caractère uniquement politique, déjà véhiculé par d’autres médias :

On est dans un espace de discussion et d’échanges. Si on l’utilise comme un tuyaux à informations, ça ne sert à rien. On ne se sert qu’à moitié de l’outil.

Du coup, une utilisation adaptée de Twitter à une campagne électorale nécessite parfois un apprentissage de la part de la classe politique dont beaucoup de membres frôlent souvent la cinquantaine et n’ont pas toujours l’expérience du net suffisante pour appréhender l’utilisation des réseaux sociaux :

Les élus quadragénaires voire quinquagénaires ont parfois une conception ancienne de l’outil. Mais il est plus simple d’agréger de vraies personnes [à Twitter NDLR] que de créer de faux comptes de followers. En plus, c’est moins difficile d’animer un compte Twitter qu’un blog qui demande une certaine expertise.

Twitter ne peut former qu’une partie du dispositif de communication qui est censé s’articuler autour d’un raisonnement de fond. Jamais, en 140 caractères, il ne sera possible de développer une pensée politique comme cela peut se faire sur un blog, un site Internet ou lors d’une interview. D’après Arnaud Mercier, la twittosphère est encore trop restreinte pour constituer un enjeu majeur :

Je ne crois pas que l’on puisse dire qu’il y ait, en France, de stratégie marketing électorale sur Twitter. Investir massivement une stratégie sur ce réseau social est un non-sens.

Cependant, Arnaud Mercier reconnaît que la forme d’interaction correspond avec les besoins de la communication politique 2.0, avec de sérieuses limites :

Les 140 signes sont en parfaite osmose avec l’habitude qui consiste à faire de Twitter un support de rédaction de petits piques à décocher en espérant que cela sera repris. Une partie de ce qui fait le buzz sur Internet a encore besoin d’un adoubement par les médias traditionnels pour avoir une influence.

Une petite révolution qu’il convient également de souligner est la communication par live tweet. Elle consiste à commenter en temps réel les émissions politiques se déroulant en direct, sur les médias traditionnels, à la télévision ou à la radio. Une évolution qui fait sens,  d’après Arnaud Mercier :

Le commentaire en live tweet des émissions politiques deviendra probablement un phénomène social. Il permet de nourrir un regard critique sur les stratégies de communication politique à grands coups de hashtag. Vous avez, en direct-live, de la contre communication politique.

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Les torts de Google redressés http://owni.fr/2012/03/21/les-torts-de-google-redresses/ http://owni.fr/2012/03/21/les-torts-de-google-redresses/#comments Tue, 20 Mar 2012 23:25:17 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=102715

La nouvelle est arrivée mardi en début d’après-midi, Google France tombe sous le coup d’une procédure de redressement fiscal pour un montant d’environ 100 millions d’euros. En cause, une partie du dispositif irlandais de défiscalisation par la firme, qu’OWNI avait décrit au mois d’avril 2011, et qui pourrait lui avoir permis d’échapper à l’impôt sur les sociétés ainsi qu’à la TVA entre 2008 et 2010.

Les îles Bermudes, la planque à billets de Google

Les îles Bermudes, la planque à billets de Google

Nous avons recueilli les procès-verbaux des sociétés de Google en Irlande, utilisées pour expédier ses bénéfices vers ...

Cette grosse punition intervient au lendemain de la révélation par le site de l’hebdomadaire L’Express d’une descente de la Direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF) et des Douanes au siège parisien de Google, le 30 juin 2011. Lors de la perquisition, de nombreux “mails, factures et autres contrats” ont été saisis puis conservés comme pièces à conviction pour évaluer le montant de l’impayé. Et déterminer l’origine des opérations menées en France auprès des clients et des fournisseurs de Google.

En d’autres termes, il s’agit d’établir si la facturation des achats de liens sponsorisés peut être légalement établie au siège social irlandais de la firme. C’est de l’évasion fiscale si les ordres ont été enregistrés en France. Sur ce point, Bercy émet des réserves quant à la localisation du centre des décisions commerciales de Google qui pourrait avoir réalisé une partie de ses opérations dans l’Hexagone sans s’acquitter du montant de la taxe.

C’est sans doute le fossé abyssal entre le chiffre d’affaires de Google France (68,7 millions d’euros en 2010) avec son cousin du Royaume-Uni (2,5 milliards d’euros), 37 fois plus important, qui a pu mettre la puce à l’oreille de la DNEF. D’autant que la France reste un pays économiquement important pour l’entreprise américaine, qui détenait 95% du marché des liens sponsorisés en 2010 et pour laquelle l’Hexagone constitue encore le quatrième pays en terme d’activité selon L’Express.

La problématique de l’enquête du fisc consiste alors à déterminer juridiquement où se trouve cette localisation. S’il s’avérait que les ordres passés en France ont suivi un “cycle commercial complet” avant d’aller directement dans les caisses de l’Irlande, la justice française redressera les bretelles du moteur de recherche avant de lui vider les poches. Dans le cas contraire, où la procédure resterait tout ce qu’il y a de plus réglementaire, Google ne paierait rien. Le ministère du Budget n’a pas souhaité faire de commentaire au nom du secret fiscal. De son côté, un porte-parole de la firme a déclaré à l’AFP :

Google se conforme aux législations fiscales de tous les pays dans lesquels l’entreprise opère, et nous sommes convaincus d’être en conformité avec la loi française.

Les avocats de l’entreprise ont donc tout intérêt à éviter un redressement fiscal qui, même s’il représente une part pouvant sembler dérisoire au regard du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise (29,32 milliards de dollars en 2010), équivaut tout de même 145% du chiffre d’affaires de Google France. Une condamnation du géant américain serait également synonyme de jurisprudence et ouvrirait la porte à des conséquences pour les autres grandes entreprises du marché notamment Facebook, Apple et Amazon connues elles aussi pour leur politique d’optimisation fiscale européenne. Les conduisant à fonder de multiples structures au Luxembourg.

Cette affaire de redressement intervient seulement quelques jours après la proposition par Nicolas Sarkozy de “taxer les géants du net” et notamment Google qui ne paie que 2,4% d’impôts ses bénéfices en Irlande. Problème, la proposition d’une taxe sur la publicité en ligne a déjà été retoquée à la demande du Conseil National du Numérique (CNN), en juin 2011.

Cette fois, le président-candidat semble décider à imposer les grandes entreprises de l’internet qui devront, s’il est réélu, “s’acquitter d’un impôt représentatif des activités dans notre pays”. Le 15 mars dernier, il déclarait à l’hebdomadaire Le Point:

Il n’est pas admissible qu’ils réalisent un chiffre d’affaires de plusieurs milliards d’euros en France sans contribuer à l’impôt


Photos sous licences Creative Commons par Stuck in Customs [CC-byncsa]

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Le drôle de manège de Disney http://owni.fr/2012/01/05/le-drole-de-manege-de-disney/ http://owni.fr/2012/01/05/le-drole-de-manege-de-disney/#comments Thu, 05 Jan 2012 08:22:35 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=92930

Le 27 octobre, deux wagons déraillaient dans l’attraction Le train de la mine à Disneyland Paris. Cet accident, heureusement sans gravité, est le second intervenu sur cette attraction en l’espace de six mois. La première fois, cinq personnes ont été blessées dont une gravement. Mais plus inquiétant, par deux fois la direction de Disneyland Paris aurait limité l’action des syndicats et empêché une expertise indépendante voulue par les services compétents. OWNI est allé faire un tour dans l’envers du décor.

Une expertise indépendante refusée

Un premier accident a eu lieu le 25 avril 2011. Lors du fonctionnement de l’attraction, un rocher du décor se décroche et, dans sa chute, blesse plusieurs adultes dont un homme de 38 ans, gravement touché à la tête. Admis aux urgences, opéré du cerveau, il ne portera pas plainte. Mais le parquet de Meaux ouvrira une information judiciaire.

Après le premier accident, l’attraction restera fermée pendant presque un mois, l’une des plus longues fermetures d’attraction depuis l’ouverture du parc. À la remise du rapport de l’expert, le parc, qui peut dans certains cas auto-certifier ses propres attractions, a rouvert Le train de mine à la fin du mois de mai, cinq mois avant le second accident. Un événement survenu dans un contexte lourd à Disneyland Paris, comme nous l’avions révélé au mois de novembre.

Le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), chargé de la protection et de la santé des salariés du groupe, ainsi que les syndicats n’auraient pas obtenu l’autorisation de consulter ledit rapport. Le CHSCT, dans une décision du 1er juin 2011 décide la mise en route d’une autre expertise à partir d’enquêtes internes menées par le syndicat UNSA. Cyril Lazaro, syndicaliste à la CGT raconte :

La nouvelle expertise se voulait indépendante et ne ciblait plus seulement sur le Big Thunder [ Le train de la mine N.D.L.R] mais l’ensemble du parc et ses attractions. Vous savez, une expertise sur un parc de la taille de Disneyland Paris prend du temps. Et surtout, cela coûte de l’argent…

La direction du parc, pour des raisons encore inconnues, a décidé de s’opposer à cette démarche et a traduit en référé le CHSCT. Dans sa décision du 20 juillet 2011, le Tribunal de Grande Instance de Meaux a reproché au CHSCT de ne pas avoir suffisamment démontré l’existence d’un “risque grave” pour la sécurité des salariés et, par voie de conséquence, des clients du parc.

Le tribunal a également reproché au CHSCT de ne pas avoir agi en amont en menant des investigations “personnelles et objectives” avant la décision du 1er juin réclamant une nouvelle expertise. Le juge a néanmoins retenu que l’on pouvait :

considérer que les témoignages des salariés, les alertes sociales, les enquêtes d’origine syndicale produites justifient effectivement des investigations plus approfondies du comité.

Sur ces motifs, le tribunal a annulé la demande d’expertise du CHSCT qui a fait appel de la décision.

Le CHSCT mis sur la touche

Depuis, un second accident a donc eu lieu dans Le train de la mine. Cette fois, c’est une pièce de type “Catapillar” utilisée lors des opérations de maintenance, qui, en sortant du rail, aurait fait dérailler les deux wagons de tête. Deux des passagers ont été légèrement blessés. Ces blessures se sont révélées plus tard sans gravité. Pour Patrick Maldidier, responsable UNSA et technicien de maintenance :

On a eu une chance extraordinaire car l’opérateur de l’attraction a déclenché l’arrêt d’urgence à temps. Il y avait une trentaine de personnes à bord du train.

La réouverture de l’attraction est décidée quatre jours plus tard après validation par les pouvoirs publics. De leur côté, les élus syndicaux, dont plusieurs ont été informés de l’accident par voie de presse, et le CHSCT, compétent en la matière, n’ont pu accéder à l’attraction que quelques heures avant la réouverture et n’ont donc, de facto, pas participé à l’enquête.

Mi-décembre encore, Antonio Ferreira, secrétaire du CHSCT service technique, restait flou :

Elle [la cellule de crise mise en place par la direction N.D.L.R] a remis l’attraction en route sans que les membres du CHSCT aient pu y accéder. En clair, on a pu contrôler l’attraction seulement quelques heures avant sa réouverture. Aujourd’hui on ne sait pas pourquoi cette pièce a lâché. J’attends toujours le rapport de l’expert.

David Charpentier du syndicat FO se demande si cette zone d’ombre ne masque pas autre chose :

Il y a des protestations à l’égard du fait que l’on ait été tenu loin de l’enquête sur l’attraction. Si on nous tient à l’écart c’est que, peut être, il y anguille sous roche. Nous sommes alors en droit de nous demander si le niveau de compétence produit est maximum. C’est difficile de l’affirmer.

La CFDT s’est également étonnée dans un courrier adressé à Philippe Gas, président d’Eurodisney, que les délégués du personnel et les personnes compétentes du CHSCT n’aient pu “accéder sur le lieu de l’attraction et la zone de l’incident” qu’après que “le système défaillant” ait été mis “hors de vue de ces derniers. (…) Ce manque total de transparence laisse planer le doute quant à la véritable réalité de cet incident.”

Maintenance débordée et démoralisée

En 2008, le système de maintenance a été refondu, découpant le parc en territoires distincts. Chacun possédant sa propre équipe. Pour plusieurs salariés avec lesquels nous nous sommes entretenus, ce changement dans le fonctionnement de la maintenance aurait eu un impact direct sur la qualité du travail. C’est notamment ce qu’affirme Patrick Maldidier, responsable UNSA :

Avant, on résonnait par type de compétence. Avec le nouveau système c’est plus de la débrouille qu’autre chose. Des gens qui n’ont pas les compétences nécessaires s’occupent d’attractions sans avoir reçu les formations nécessaires. Aujourd’hui, beaucoup estiment que «la réorganisation» remet en cause la maintenance que l’on faisait avant.

Cependant, il reconnaît que “le nombre d’accidents par rapport au nombre de personnes reçues chaque jours reste très faible” et cela sans doute grâce au fait que “les attractions sont vérifiées tous les jours et des tests avec des salariés du parc sont effectués”. Selon lui, c’est plutôt le “taux d’accidentologie” chez les salariés qui est à remettre en cause à Disney :

Le taux d’accidentologie chez les salariés dépasse celui des travaux publics. On bat des records d’années en années. Les gens n’en peuvent plus. Ils sont épuisés moralement car la maintenance n’a pas suffisamment de moyens.

Un point de vu partagé par Antonio Ferreira, secrétaire du CHSCT :

Beaucoup d’installations actuelles sont vétustes et les effectifs n’ont pas augmenté avec l’arrivée de Walt Disney Studio. C’est-à-dire que l’on s’occupe d’une surface beaucoup plus importante avec le même nombre de techniciens. Sur le dernier accident, la pièce qui a lâché aurait très bien pu céder avec l’ancien système de maintenance. Cela n’a, sur ce cas spécifique, rien à voir. Mais vus les conditions de travail et les moyens insuffisants qui sont donnés au CHSCT…

Sur ces sujets, la direction du parc, que nous avons contacté à plusieurs reprises, a souhaité réagir sobrement. Par un lapidaire :

“Nous contestons ces éléments et ne souhaitons pas apporter d’autres commentaires”

Tout est dit.


Illustration par Loguy pour Owni [ccbyncsa]
Illustration additionnelle par Nuchi Corp via Flickr [ccbyncnd]

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Mickey perd ses nerfs http://owni.fr/2011/12/07/mickey-perd-ses-nerfs-disneyland-paris/ http://owni.fr/2011/12/07/mickey-perd-ses-nerfs-disneyland-paris/#comments Wed, 07 Dec 2011 16:54:47 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=89554

Grande nervosité à l’état-major d’Euro Disney Associés, exploitant le parc Disneyland Paris. La direction invite de manière pressante les salariés du parc à ne plus parler aux journalistes. Dans un courrier interne du 24 novembre dernier (reproduit en intégralité ci-dessous), Karine Raynaud, présidente du Comité d’Entreprise et en charge des relations sociales chez Disneyland Paris, s’insurge contre la publication de l’audit confidentiel décrivant les conditions de travail chez Disney – révélé sur OWNI le 22 novembre. Et menace les salariés vaguement sensibles à la liberté d’expression qui confieraient à la presse quelques secrets sur les coulisses de Disneyland Paris :

Au vu de ce qui précède, nous nous réservons le droit (…) de prendre toutes les mesures nécessaires afin de faire cesser de tels agissements, [et] d’en sanctionner les auteurs.

Contacté par OWNI au sujet de la tonalité de cette lettre, la direction du parc ne nous a pas encore répondu. Cependant, selon le site internet du syndicat FO Disney, le vice-président d’Euro Disney, Daniel Dreux, en charge des ressources humaines aurait déclaré que la direction du parc ne travaillera pas avec “les opposants“. Des propos confirmés par plusieurs témoins avec lesquels nous nous sommes entretenus. Ambiance.

Ces tensions ont été accentuées par le report d’une négociation sur la prime d’intéressement, initialement prévue le 16 novembre et repoussée à janvier 2012. La mise en place de la prime d’intéressement devait constituer une contrepartie à la signature par plusieurs organisations syndicales du “Plan salaire 2011” prévoyant la suppression de la prime de fin d’année pour les salariés non cadres. La CFDT, l’un des syndicats signataires dudit accord, a réagi sur son site internet :

La section CFDT Eurodisney (…) dénonce le non respect des engagements pris par la Direction de l’entreprise dans le cadre du plan salaire 2011. En effet, celle-ci vient d’annuler sine die et sans motif avéré, le processus de négociation de l’accord d’Intéressement, accord visant à associer les salariés à la croissance de l’entreprise. Encore une belle preuve de respect de la Direction vis à vis de ses salariés et qui non contente de se jouer de ces derniers, envisage aussi de raboter fortement les bonus annuels attribués aux team leaders. Scandaleux ! Et que dire du projet récemment présenté aux élus du comité d’entreprise, « Talent d’Equipe », un contrat social impliquant la responsabilité des acteurs mais aussi le respect de la parole donnée et des engagements pris. Leurs actes parlent pour eux même. Tout est dit …

Eurodisney, par la voix de son vice-président, Daniel Dreux, dans un courrier-réponse adressé au syndicat FO a fait valoir la nécessité pour l’entreprise “de refaire l’ensemble du processus budgétaire” et “de prendre en considération l’impact additionnel des différentes mesures gouvernementales annoncées dans le cadre du plan d’austérité”.

Contactés par téléphone, plusieurs responsables syndicaux ont indiqué que “le Noël 2011 se ferait sans prime de fin d’année et sans prime d’intéressement” pour les salariés.


Retrouvez nos précédentes enquêtes sur Disneyland Paris.

Illustration de marco c. [cc-bync] via Flickr

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